• Illustration de la Genèse

     

     

    Pour l'humanité,

    Dieu a ajouté

    le raisonnement,

    il a développé le rêve

    et la liberté.

    Nous acquittons-nous de cette faveur ?


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  • Le plus grand des oiseaux

     

    L'autruche,

    le plus grand des oiseaux vivants, intrigue ;

    mais elle est aussi la preuve que la quantité

    n'est pas une garantie de réussite.


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  • Bouche de la vérité

     

     

    Le

    savoir

    expert

    fuit

    la

    démocratie.


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    Oui, dans cette éditionL'enseignement du début du secondaire me pousse vivement à lire. Mon père, passionné de littérature, m'y encourage de plus en plus instamment. L'image que j'ai de moi, celle d'un intellectuel, m'y incite impérieusement. Mais voilà : je ne lis pas ! L'exercice me semble insurmontable.

    Je me sens honteux, incohérent, mais en même temps mets une certaine fierté à résister à toutes ces exhortations.

    Vers treize ans, assis sur un canapé brun claire, seul, je n'ai rien à faire. Il est environ 13h, c'est dimanche - oui, je me souviens de tout.

    J'étends la main, prends un livre dans un petit meuble se trouvant juste à côté de moi et, comme je le fais de temps à autre, le regarde, le palpe. C'est le Voyage au centre de la Terre de Jules Vernes, dans la bibliothèque verte, (eh non : pas chez Hetzel), avec quelques illustrations au style années cinquante, que je n'aime pas.

    Pour distraire mon ennui, j'en survole des passages afin de vérifier que cette littérature destinée aux adolescents ne peut pas m'intéresser.

    L'impensable se produit alors et je ne le lâche plus, allumant la lumière de la grande lampe qui se trouve à côté de Illustration, par Riou, d'un combat entre un ichtyosaure et un plésiosaure.moi lorsque le soir tombe, pour continuer à le dévorer. En tournant les pages, je suis bouleversé par la puissance de cette chose que je croyais morte : du papier et de l'encre.

    J'ai le sentiment que les feuilles expulsent vers moi un flot d'images, d'émotions, de réflexions, comme une sorte de projecteur dont mon visage - ou mon cerveau - serait l'écran.

    Je suis stupéfait de ma performance et surtout du fait que je ne me suis pas forcé, bien au contraire. Un livre entier, en moins d'une journée !

    Mais je ressens aussi une terrible nostalgie en réalisant que l'univers que je viens de traverser ne peut pas entrer dans la réalité. Si je partais maintenant pour l'Islande, je ne trouverais pas le cratère du Sneffels qui me permettrait de mettre mes pas dans ceux d'Axel pour pénétrer, en vrai de vrai, au centre de la Terre.

    Ce voyage extraordinaire dans les mondes connus et inconnus, roman d'initiation à la limite du mythe, met en scène des jeunes gens qui, subissant un certain nombre d'épreuves, passent de  l'enfance à l'âge adulte. Je ne pouvais mieux tomber, car sa lecture m'a conféré enfin, à moi aussi, un des attributs des adultes : lire un livre !

    Je conçois alors que la lecture m'ouvre, non sans m'éprouver, Rencontre avec des créatures mi-homme, mi-singedes perspectives jusque-là inaccessibles, inattendues, dont je ne maîtrise pas les effets.

    Aujourd'hui encore, chaque fois que je vais m'attaquer à un nouveau texte, je ressens cette sorte de petit nœud à l'estomac, de léger mouvement de recul.

    Je sais que chaque bouquin, au moins en un passage, risque de me toucher si profondément que je réévaluerai des pans entiers de mon existence et que, pendant un certain temps, j'en serai accablé.

    Certes, la culture permet d'accroître sa conscience du monde et de soi-même, mais cela ne se fait pas que en y trouvant  du plaisir. Je vérifierai encore maintes fois que la force des oeuvres apparaît lorsqu'elles nous ébranlent, rudement.


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    Culture scientifique
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    Un processus explicatif

     

    Dans un premier temps, on peut caractériser la science de la manière suivante : un corps de connaissances ou d'études ayant un objet déterminé et reconnu, des méthodes heuristiques propres, fondées sur des relations objectives entre les éléments pris en considération, le plus souvent de manière quantifiée.

    Elle s'oppose à la connaissance « vulgaire », aux opinions, car elle unifie des notions, sans elle confuses et éparses, elle s'oppose à la philosophie en ce qu'elle est spécialisée et ne retient que des faits positifs, à la religion car elle se fonde sur la raison et écarte les influences non démontrables de mondes invisibles, à l'art car elle n'a pas de but esthétique, à la technique car les applications pratiques ne sont pas sa fin dernière.

    Se situant entre ces puissances et capacités distinctes, la science prétend parfois à la totalité, mais les religions la revendiquent également, ainsi que la littérature, la poésie ou l'art, voir la psychologie et les idéologies.

    Gaston Bachelard (1884-1962)La science est avant tout un effort conscient d'investigation. Selon Bachelard, celui-ci présuppose la rêverie[1] « la science se forme plutôt sur une rêverie que sur une expérience et il faut bien des expériences pour effacer les brumes du songe. ».

    Cette médiation imaginative est antérieure au concept, à la formule et à l'image, qui eux vont différencier culture humaniste et culture scientifique[2]. « La science et son objet diffèrent de l'opinion et de son objet, en ce que la science est universelle et procède par des propositions nécessaires et que le nécessaire ne peut être autrement qu'il est » (Aristote).

    Tel est un des premiers principes de la science. Cependant la science n'est pas immuable, elle progresse, satisfaisant ainsi à une des tâches essentielles du psychisme de l'homme qui tend à l'invention, l'activité, voire l'aventure.

    La science est un biais pour comprendre le monde, agir sur lui et le rendre prévisible. Elle s'efforce de parvenir à l'intérieur des choses, au fond des objets qu'elle considère, conçus comme le terme même de son activité.

    Les vérités qu'elle élabore surgissent, parfois lentement, du chaos, mêlées à l'illusion et à l'erreur. Un mouvement dialectique incessant de discrimination va du vrai au faux, comme du faux au vrai, en dépassant les conditions qui ont donné lieu aux représentations et systèmes que la science conçoit.

    L'erreur et l'illusion sont des moments de la connaissance, dont se dégage ce qui, à un certain moment, peut être baptisé : la vérité. Son élaboration suppose des raisonnements rigoureux, permettant d'atteindre au nécessaire et à l'universel, annoncés par Aristote. Les démonstrations deviennent ainsi indépendantes des hasards de l'expérience, toujours pratique et contingente, pour devenir des évidences nécessaires.

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    L'esprit scientifique

     

    Esprit scientifiqueL'esprit possède, avant même de procéder à toute démarche scientifique, une exigence de liaison des phénomènes entre eux, d'explication et d'argumentation par des causes et des effets[3] : « le principe de causalité, invitation à découvrir ».

    L'expérience fournit la précieuse matière de la connaissance, mais c'est l'esprit qui, d'une part dispose l'expérience dans son enveloppe spatio-temporelle et qui, surtout, lui donne ordre, cohérence et signification, par l'exercice de son jugement, par la reconnaissance de relations entre les phénomènes observés.

    Ce qui apparaît lié dans les phénomènes de la nature, a été en fait rattaché par l'esprit.

    C'est l'esprit humain qui construit lui-même, avec l'appui de la substance que procure la connaissance sensible, l'objet de son savoir et ses systèmes épistémologiques.

    L'esprit scientifique induit par lui-même un élargissement continu des cadres de la connaissance, qui n'est donc jamais définitivement stabilisée[4]. « On fait de la science avec des faits, comme on fait une maison avec des pierres ; mais une accumulation de faits n'est pas plus une science qu'un tas de pierres n'est une maison (Poincaré).

    Ni le champ d'analyse de la science ni ses méthodes d'approche ne sont clos ou figés. Ces progrès mettent en cause les fondements même de l'esprit scientifique, car ils résultent d'une réflexion sur les concepts initiaux de la science, d'une mise en doute des idées évidentes.

    C'est ainsi que la représentation intuitive du concept de matière, de loi naturelle, de déterminisme, ne peuvent plus être admis sans avoir préalablement été réévalués. Mais il y  plus, les facultés de l'entendement ne sont pas non plus éternelles[5] : « Les principes de notre raison ne sont pas des catégories intangibles, mais sont susceptibles d'évoluer par le dialogue continuellement poursuivi entre la raison et l'expérience.

    "Les principes de la raison sont relatifs au moment de l'histoire où ils s'exercent (...). En ce sens on peut dire que la science instruit la raison" (Bachelard). L'astronomie de Newton est un cas particulier de la relativité d'Einstein, comme la géométrie euclidienne est un cas particulier de la « pangéométrie » de Lobatchevski.

    Le temps et l'espace sont à reconsidérer et cet examen retentit sur les structures même de l'entendement. « L'allure révolutionnaire de la science contemporaine doit réagir profondément sur la structure de l'esprit. L'esprit a une structure variable dès l'instant où la connaissance a une histoire[6]. ».

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    Importance de l'irrationnel

     

    La science n'est pas constituée définitivement, ni par l'ensemble des connaissances, ni par ses méthodes, ni par les champs qu'elle investit. Elle est de toute part sujette à l'invention, « quête inachevée vers la connaissance objective » ; Popper la distingue des autres domaines du savoir, par sa capacité à être réfutée (falsifiabilité), plutôt qu'à être vérifiée.

    La succession des systèmes épistémiques, l'un invalidant le précédant, expriment le progrès des sciences et l'aspect dynamique de la vérité.

    Or la logique est inutile à l'invention : elle sert davantage à circonscrire l'erreur, qu'à découvrir la vérité.

    En dernier ressort, l'expérimentation est une interprétation contrôlée de la nature. Il y a choix de faits désignés comme significatifs, ou cruciaux, par l'observateur. De là l'hypothèse se confirme ou s'infirme, conduisant à des lois de plus en plus générales - raisonnement inductif - et même à la réévaluation de la notion de loi, qu'apportent les raisonnements probabilistes actuels.

    Les impulsions dynamiques qui traversent la science peuvent prendre leur source, radicalement, en dehors d'elle. O.C. de Beauregard va jusqu'à affirmer que[7] « toute découverte importante est irrationnelle. Jamais un rationaliste n'aurait inventé la théorie des quantas ».

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    Science et culture globale

     Prométhée, aventure de l'intellect

    La science n'est pas avant tout un savoir, elle suppose un enrichissement. La culture scientifique se trouve solidaire des autres domaines qu'explore l'esprit de l'homme.

    Elle s'insère dans la culture globale, lieu de ces interactions.

    Elle est en fait indissociable de la culture lato sensu, car elle participe de ce trésor collectif possédé par l'humanité, en ce qu'elle contribue à la formation de l'esprit de la personnalité tout entière, avec l'intelligence, la sensibilité et les facultés de discernement esthétique, ainsi que les voyages et l'expérience de la vie.

    Particulièrement spécifique de la culture occidentale, elle développe certaines dispositions de l'esprit, avec d'autres, exerçant toutes ensemble l'esprit critique, le jugement et le goût.

    Alain remarque : « Comte, si souvent profond, fut l'égal des plus grands lorsqu'il définit la prière par la poésie. Cette parole mesurée, de sois à soi,... donne du large et la respiration convenable. Le regard de l'esprit se porte au loin et met chaque chose en sa juste place. Je retrouvais cette même idée, que je n'attendais guère, en lisant les observations et les raisonnements du célèbre Lyell sur les volcans... en un passé où l'homme n'était point. Ce genre de paysage repose l'œil... Ce qui nous manque, quoique nous sommes entrain pour le faire, c'est l'homme universel, dans tous les sens de ce beau mot. L'homme de métier gâte nos affaires, par une conscience trop rapprochée de ce qu'il fait, et je dirai presque le nez dessus[8]. »

    C'est toute la culture, y compris la science, qui, opposée à un savoir se résumant à une simple acquisition de connaissances, par l'attention qu'elle voue aux grandes réalisations du passé, en leur conférant une valeur inspiratrice, peut rendre apte à apprécier les réalisations actuelles et inciter à la création d'autres perspectives. <o:p> </o:p>


    [1] G. Bachelard, La formation de l'esprit scientifique, Paris, Vrin, 1938.
    [2] Aristote, L'Organon, 2e analytique, I, 33, Pris, Vrin, 1936-1939.
    [3] I. Kant, Critique de la raison pure, In Vergez, A. et Huisman, D., Histoire des philosophies, Paris, Nathan, 1966.
    [4] H. Poincaré, In Petit Robert 1, Article « Science », Paris 1987.
    [5] G. Bachelard, Le nouvel esprit scientifique, Lausanne, Payot, 2e éd. 1982.
    [6] K. R. Popper, La logique de la découverte scientifique, Lausanne, Payot, 2e éd. 1982.
    [7] O. Costa de Beauregard, In Rivoire, J., Drôles de citations, Paris, Bordas, 1987.
    [8] Alain, Propos II, Paris, Gallimard, Pléiade, 1970.


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